Drogues et assuétudes

Cette thématique s’inscrit aussi sur la liste de comportements à risques tels que la consommation d’alcool et de tabac. L’adolescence est une étape qui marque de nombreux passages à l’acte : de la simple curiosité, le jeune passe à l’expérimentation. Ses motivations sont multiples et variées. Dans certains contextes ces dernières sont plutôt saines et sous contrôle, et parfois elles sont liées à de grandes vulnérabilités (anxiété, dépression, mise en danger volontaire, etc.). Dans ce dernier cas, le jeune peut perdre l’équilibre, faire ses premiers pas dans un cycle de consommation problématique, voire s’ancrer dans une dépendance.

Pour soutenir au mieux le jeune dans ses choix et ses expériences, il est donc essentiel de discuter en toute transparence des consommations à risque, de partager les motivations de chacun à s’y essayer et de l’existence de services d’accompagner en cas de besoin.

Objectifs de l’animation

  • Favoriser la réflexion sur les consommations de drogues et sur les pratiques excessives (ex : jeux en ligne) ;
  • Encourager une prise de recul sur les motivations qui entrainent une pratique excessive et/ou une consommation de drogues
  • Initier des échanges sur les concepts de « dépendance », d’ « assuétude » et d’ « équilibre »

Représentations de l’animateur

Avant d’entamer l’animation, il est fortement recommandé de vous questionner sur vos propres représentations liées à la thématique. En effet, lors du débat, les adolescents échangeront des idées (avis, opinions, arguments) auxquelles vous adhérerez ou au contraire auxquelles vous serez opposé. Et c’est tout à fait normal. Les expériences uniques de chaque individu façonnent la manière d’interpréter certains sujets.  Dès lors, les notions de respect, de jugement et de représentations sont étroitement liées.

En tant qu’animateur, il est donc essentiel d’être attentif à ses propres représentations, de ne pas les exprimer afin qu’elles n’interfèrent pas dans le débat des adolescents. Ils risqueraient de se sentir jugés et la spontanéité du débat en serait affectée.

Rappelons-le, l’important est que les jeunes puissent s’exprimer sans tabou, ni crainte d’être jugés. L’attitude de l’animateur doit être accueillante et respectueuse.

Si la thématique constitue un sujet sensible pour vous, il est par exemple possible de co-animer le débat avec une personne à l’aise avec le thème.

Théorie

Les drogues et autres comportements à risque : pourquoi essayer ?

Il existe de nombreuses raisons qui amènent un jeune à consommer des drogues et/ou à initier une nouvelle pratique. La période de l’adolescence fait partie de ces périodes sensibles où l’influence du groupe peut soutenir les forces du jeune mais aussi fragiliser certaines de ses failles. Par ailleurs, à cette période de sa vie,  le jeune, consciemment ou non, va expérimenter de nouveaux comportements pour explorer l’inconnu, se dépasser, s’intégrer à un groupe, dépasser ses peurs, améliorer ses performances (durant les examens, la résistance à la fatigue dans des fêtes), etc. Cette période se caractérise aussi souvent par l’envie d’adopter des conduites à risques et de braver les interdits. L’influence des médias (célébrités, réseaux sociaux, clips, paroles de chansons, etc.) renforce généralement ces nouvelles expériences à risques.

Gardons en tête que chaque histoire de consommation est issue de l’interaction entre une personne (ses besoins, ses motivations, ses caractéristiques, ses valeurs, etc.), une substance/comportement (les effets, la fréquence de consommation, etc.) et le contexte (société, moment de la consommation, l’entourage, etc.). Le résultat de cette rencontre influencera le type d’usage que le jeune adoptera.

Drogues et pratiques excessives : quel usage ?

Les « drogues » sont des substances psychoactives qui modifient l’état de conscience et le comportement du consommateur. Il existe différentes manières de les classer : selon leur composition, la législation, ou encore leurs effets.

A ces substances, on peut aussi ajouter les comportements ou pratiques dites excessives qui provoquent également des perturbations de l’état de conscience : jeux vidéo, jeux de hasard, etc. En effet, la manière dont le consommateur va faire usage de cette consommation ou de cette pratique aura un impact sur son équilibre de vie au quotidien. Cet usage peut être « doux » ou « dur ». Certains jeunes pourront consommer occasionnellement, trouver une forme de plaisir momentané sans que cela n’impacte leur fonctionnement quotidien. On parle alors d’usage « doux ».

Les formes d’usage « dur » sont rencontrées lorsque les différentes sources de plaisir du jeune se réduisent progressivement vers une seule : sa consommation/sa pratique (smartphone/cannabis/alcool/jeux vidéo/cocaïne/etc.). La consommation ou la pratique devient alors excessive et peut mener à une dépendance.

Dépendance ou assuétude ?

Il est important de comprendre que nous ne sommes pas tous égaux face aux effets des consommations à risque telles que les substances psychoactives et les pratiques dites excessives. En quelques mots : tout le monde présente des dépendances mais tout le monde n’est pas susceptible de présenter des assuétudes. Trois explications à cela :

  • le terme « dépendance » se définit par l’apparition de symptômes de sevrage lors de l’arrêt d’une consommation. La répétition fréquente d’une consommation va dérégler le fonctionnement du circuit de la récompense en augmentant la production de dopamine et donc donner au cerveau l’envie de reproduire cette sensation de plaisir en répétant la consommation. Sur ce point, tout le monde est susceptible d’être dépendant d’une consommation/pratique: chocolat, tabac, café, relations sexuelles, cocaïne, jeux vidéo, etc. Une personne dépendante n’est pourtant pas systématiquement « addict ».
  • les termes « addictions » et « assuétudes » se définissent par l’incapacité d’arrêter une consommation malgré les effets négatifs de celle-ci. Cette consommation incontrôlable est due à une haute sensibilité du cerveau face aux signaux de plaisir envoyés par les neurotransmetteurs. En d’autres mots, une personne qui prend un antidouleur puissant, suite à une opération pendant une dizaine de jours, deviendra rapidement dépendante mais elle sera en mesure de supporter les symptômes de manque lorsque elle arrivera au bout de son traitement. Or une personne dont le système nerveux est vulnérable serait dans l’impossibilité de s’arrêter même si les effets deviennent négatifs.
  • On peut aussi observer un comportement qui se situe entre ces 2 états « dépendance » et « addiction/assuétude », on parle alors de consommation problématique ou de pratique excessive. C’est bien souvent ce cas-ci qui est observé chez les jeunes : une consommation récréative et répétée malgré les effets négatifs, qui peut évoluer chez certains jeunes vers une dépendance, voire une assuétude.

Consommation problématique, pratiques excessives et équilibre de vie

Chaque personne évolue au quotidien dans un environnement dit « équilibré », c’est-à-dire qui se structure autour de différentes éléments : la famille, les amis, la santé, l’école, le sport, les loisirs, les projets de vie, le travail, etc.

Comme évoqué plus haut, la consommation de substance ou la pratique d’une activité peut, dans certaines situations, nuire à cet équilibre de vie et devenir elle-même une consommation/pratique problématique, voire une assuétude.

Il est possible d’évaluer la place que prend une consommation ou une pratique en se posant quelques questions :

  • Y’a-t-il un produit que je consomme de manière excessive ? Puis-je m’en passer ?
  • Combien de temps est-ce que je consacre à satisfaire mon état de manque ?
  • Quelle place prend cette consommation ou cette pratique dans ma vie ?
  • Est-ce que ma consommation ou ma pratique a des conséquences sur ma vie au quotidien (études, sommeil, famille, santé, amis, etc.) ?
  • Ma consommation ou ma pratique me pose-t-elle problème ? Ou à mon entourage ?
  • Ma consommation ou ma pratique excessive est-elle le problème central ? Ou est-ce un symptôme, un signe qu’il y a des problèmes ou des difficultés à un autre niveau dans ma vie ?

Effets d’une consommation problématique

Les comportements tels que la consommation de substances et/ou la pratique excessive d’activité (jeu vidéo, smartphone, etc.) présente des bénéfices pour le consommateur (plaisir, convivialité, légèreté, désinhibition, etc.). Cependant, la répétition de ces comportements occasionne aussi de nombreux risques. Lorsque ces conduites deviennent problématiques et menacent l’équilibre de vie, il est possible d’observer certains effets au niveau physique, psychologique et/ou social.

Ces effets peuvent être ponctuels ou s’installer dans la durée. Leur intensité dépend de plusieurs facteurs, en voici quelques exemples : les propriétés du produit consommé (stimulant, hallucinogène, dépresseur), la quantité consommée, la durée et le degré de dépendance de la personne.

Selon les personnes, on peut observer des effets physiques, psychologiques et sociaux. A titre d’illustrations, citons brièvement : perturbation des perceptions sensorielles, troubles cognitifs, crises d’angoisse, paranoïa, troubles du sommeil, isolement, décrochage scolaire, augmentation des conduites à risques, etc.

Il est important de noter qu’il existe autant de risques différents qu’il y a de drogues ou de produits. (toutes les infos sur www.infor-drogues.be).

La législation belge

La loi distingue les drogues licites et illicites.

  1. Les drogues licites

Les drogues et les produits appelés drogues licites désignent les substances dont la consommation et la vente ne sont pas interdites par la loi d’un pays. Ces produits sont identifiés comme « non nuisibles » à la société (bien que cela se discute et évolue, par exemple pour le tabac). En Belgique, l’alcool, le tabac, les médicaments (certains sur prescription), et la plupart des produits dopants sont socialement acceptés et très faciles d’accès. Ces consommations sont banalisées dans notre société, néanmoins, elles sont loin d’être inoffensives. Il reste indispensable de développer des campagnes de prévention, de renforcer les cadres législatifs de consommation pour ainsi limiter les risques pour la santé des consommateurs et de la société.

  1. Les drogues illicites

Une drogue illicite est une drogue dont la consommation et la vente sont interdites par la loi d’un pays. Toute consommation et vente de substances psychoactives telles que les amphétamines, l’ecstasy, les hallucinogènes, l’héroïne et le cocaïne sont défendus en Belgique. Ces drogues sont considérées comme dangereuses pour le consommateur, et peuvent nuire à la vie en société.

Le cannabis : un cas particulier ?

Certains classent cette drogue parmi les moins dangereuses vu le plus faible risque de dépendance physique. Notons que la consommation de cannabis, même à faible dose, provoque une diminution de la concentration et de la mémorisation ; et qu’une dépendance est un processus qui débute aussi au niveau psychique.

Cannabis et la loi : la détention et la consommation sont interdites pour les mineurs, quelles que soient les quantités et les circonstances. C’est la tolérance zéro qui est appliquée. Pour les personnes de plus de 18 ans (depuis le 1er février 2005), la détention de 3 gr de cannabis ou d’une plante est tolérée dans le cadre d’un usage personnel uniquement. En cas d’infraction, un mineur sera poursuivi devant le tribunal de la jeunesse (loi du 08 avril 1965), tandis que les personnes majeures seront poursuivies pénalement. Si vous souhaitez avoir davantage d’information sur la législation spécifique du CBD (cannabidiol), nous vous invitons à parcourir le document réalisé par le SPF Santé publique.

Quelques pistes pour accompagner les jeunes

Sortir d’une dépendance est un processus difficile. Cette démarche nécessite du temps (quelques semaines, des mois, des années) et peut être éprouvante physiquement (au moment de la phase de « sevrage ») et psychologiquement. La motivation de la personne est primordiale. Mais la volonté à elle seule ne suffit pas toujours. L’aide de professionnels et le soutien de l’entourage sont indispensables dans la majorité des situations.

N’hésitez pas à cliquer sur cette page de la Mutualité chrétienne si vous souhaitez solliciter des professionnels qui pourront compléter les informations de cette fiche, ainsi que proposer des services d’aide pour les jeunes ou d’accompagnement pour vos animations et projets.

Ressources pour aller plus loin

Animation Frasbee

Les motivations à consommer une substance psychoactive sont variées. Généralement, l’initiation est accompagnée de curiosité qui encourage l’envie de tester ses limites avec de nouvelles sensations. Parfois, les motivations sont aussi de chercher un apaisement à des émotions douloureuses, on recherche alors une forme de bien-être. Il faut aussi noter que les effets de ces consommations ne procurent pas systématique une sensation de plaisir. Il existe aussi des effets négatifs (bad trip, perte de jugement, etc.). Par ailleurs, au plus on consomme une drogue, au moins on en ressent les effets positifs. Les sensations de plaisir peuvent évoluer en sensation de manque, dans ces cas-là, la consommation devient un moyen de combler ce manque et plus un plaisir.

La volonté est indispensable, mais dans de nombreuses situations elle n’est pas suffisante. Elle va généralement nécessiter un accompagnement psychologique et/ou médical et/ou social pour soutenir le sevrage. Il est important de ne pas réduire le processus du sevrage à « la volonté » car beaucoup de consommateurs perdent alors davantage confiance en eux et en leur capacité à surmonter cette épreuve.

La rencontre entre un consommateur, un produit et le contexte dans lequel cette rencontre a lieu, est toujours unique. Toute initiation ne garantit donc pas une dépendance puisque les facteurs qui interagissent varient en fonction des caractéristiques propres du consommateur, du produit et du contexte. Certaines personnes seront donc plus vulnérables lors de leur première expérience et auront une forme de satisfaction qu’elles souhaiteront répéter de façon excessive. La consommation problématique, voire une assuétude, prendra alors place. Pour d’autres personnes, l’équilibre de vie ne sera pas bouleversé. Le risque est donc toujours présent.

Certaines pratiques telles que les jeux de hasard ou les jeux vidéos peuvent devenir excessives. Ces dernières sont considérées comme des comportements addictifs car elles activent les mêmes circuits neuronaux qu’une substance psychoactive. Ces pratiques peuvent également bouleverser l’équilibre de vie d’une personne en devenant des comportements obsessionnels, et donc problématiques. On observe alors des symptômes de manque similaires aux drogues classiques lorsque la pratique n’est pas réalisée.  Ces comportements présentent donc aussi des risques d’assuétude, même s’ils se consomment différemment.

La disponibilité des produits dépend souvent du cercle social. Les drogues les plus répandues et accessibles financièrement (l’alcool, le tabac, le cannabis, les médicaments, etc.) sont généralement des drogues (semi) légales. Cependant, facile d’accès ne signifie pas sans risques. L’usage modéré de ces drogues limitera les risques. Pour les drogues illégales, l’accès est parfois facile aussi. En effet, il existe un marché parallèle important. Dans ces cas précis, connaître l’origine du produit qu’on consomme évitera des situations d’intoxication, ou les effets secondaires sévères, en particulier avec les drogues de synthèses (ecstasy, LSD, etc.).

Dire « non » est souvent difficile. La pression des pairs, la crainte d’être perçu comme différent, d’être rejeté, etc., contribue à la difficulté de ne pas oser dire « non ». Les jeunes expérimentent de nombreuses situations, chacun à un rythme différent et avec des attentes personnelles. Si certains essaient les drogues, cela ne signifie pas que c’est un passage obligatoire pour tous. Refuser une proposition ne rend pas le jeune moins intéressant. Cela traduit davantage une forme de courage, de confiance en soi et/ou de confiance en son entourage de respecter ce choix. Il y a de l’audace à oser l’inconnu, tout autant qu’il y en a à choisir de ne pas le faire.

Il existe en effet des marchés parallèles qui rendent les drogues illégales accessibles. Les arguments en faveur d’une légalisation prônent une meilleure sécurité des produits grâce, entre autre, à une traçabilité et un contrôle de qualité. Or l’existence des marchés noires privilégie l’absence de contrôle et augmente ainsi les risques. Les drogues illégales gardent leur statut « d’inaccessible, d’interdit et de nocif », et paradoxalement, les médias leur offrent une visibilité qui renforce leur attractivité (films, séries, influenceurs, etc.).

L’être humain dépend de certains comportements indispensables à sa survie (respirer, boire, manger, etc.). Ensuite, on peut identifier des comportements secondaires liées à des consommations ou des pratiques : le sport, le sucre, les écrans, la caféine, le sexe, le chocolat, l’alcool, etc. Si ces comportements évoluent et deviennent indispensables au fonctionnement de la personne, alors on parle bien de dépendance. Si malgré les effets négatifs, la personne ne parvient pas à s’empêcher de consommer alors il s’agit plutôt d’une assuétude liée à une vulnérabilité du système neuronale.

Documents à télécharger

Ci-dessous, il est possible de télécharger le dossier « Drogues & assuétudes » reprenant tout le contenu théorique de cette page thématique afin de préparer l’animation. Il est également possible de télécharger le fichier d’animation Frasbee de cette même thématique. Une fois imprimé, il vous suffira de découper les phrases de débat que vous souhaitez utiliser lors de l’animation.

Tous les dossiers théoriques, thématiques et les fiches d’animation Frasbee sont également téléchargeables depuis la page Supports

Thématiques associées

Si vous souhaitez approfondir ce sujet, n’hésitez pas à compléter son contenu et les phrases d’animation avec une des thématiques ci-dessous. Selon votre cadre et le temps dont vous disposez, la combinaison de sujets complémentaires peut augmenter la richesse des débats et favoriser la participation des jeunes. Cependant, il est recommandé de ne pas sélectionner plus de 10 phrases débats en associant plusieurs thématiques. Choisissez-les en identifiant au préalable les thèmes de débat que vous souhaitez encourager chez les jeunes.